Noélie Clémence est une jeune vétérinaire et prend son métier à cœur. Mais à 30 ans à peine, elle a déjà des doutes quant à la suite à donner à sa carrière. « La passion, elle est là et elle sera toujours là. C’est vrai que c’est un métier extraordinaire« , raconte la vétérinaire de Mont-sur-Marchienne. « Moi, je ne regretterai jamais d’avoir fait les études ne fut-ce qu’intellectuellement. C’est vraiment très riche et je ne regretterai jamais. Mais arrêter de pratiquer, oui, j’y ai beaucoup pensé et j’y pense encore. Et je ne suis pas certaine que j’arriverais à faire toute ma carrière. »
Arrêter de pratiquer, oui, j’y ai beaucoup pensé
La qualité des soins vétérinaires a augmenté, l’exigence des clients également. Aujourd’hui, on peut faire un scanner ou opérer son animal de compagnie. Mais contrairement à la médecine humaine, la médecine vétérinaire n’est pas remboursée. C’est là que la violence commence pour notre jeune doctoresse. « Ils nous font payer la moindre augmentation et tout ce qui est obligatoire. Par exemple, le vaccin rage est obligatoire pour partir en vacances avec son animal de compagnie. Mais les gens viennent avec des pieds de plomb. Mais à la base, c’est un cadeau de l’État de ne pas devoir vacciner leurs animaux de manière systématique. »
Autre contrainte du métier : les vétérinaires doivent être disponibles 24 heures sur 24 alors que leur charge administrative augmente. La pression est énorme. Selon une étude publiée par l’Ordre national des vétérinaires en France en 2022, ils ont trois fois plus de risque de mettre fin à leur jour que la population générale.
Le vétérinaire sait donner la mort
« Le vétérinaire a un facteur de risque, c’est qu’il sait donner la mort et il la donne régulièrement dans des conditions paisibles », commente Léonard Thénon, vice-président de l’Union professionnelle vétérinaire. « Il sait que ce passage à l’acte est relativement sans souffrance pour l’animal. Il peut le reproduire, il a accès au produit, ce qui crée une autre façon d’aggraver les risques. »
Le hashtag #noonemorevet, autrement dit « pas un vétérinaire de plus » pullule sur les réseaux sociaux. Il a l’avantage de libérer la parole. Le suicide chez les vétérinaires ne doit plus être un tabou. « À l’école, on doit informer sur le risque psychosocial« , continue le représentant de la profession. « Cela se fait dans d’autres métiers : les pompiers, les ambulanciers, les policiers, les militaires, les infirmiers, notamment aux urgences et en gériatrie. Ils ont des programmes de ce qu’on appelle le travail des émotions, c’est-à-dire apprendre à fermer la porte, à ne pas conserver son métier quand on rentre chez soi. »
En cas d’idées noires, des structures comme un Pass dans l’impasse ou prévention suicides existent. Leur numéro d’appel est gratuit : 081/777.150.