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Lahcen Hammouch : « La Belgique et son casse-tête énergétique : entre nucléaire, énergies vertes… et confusion généralisée »

Depuis vingt ans, la Belgique nous promettait une sortie du nucléaire. C’était presque devenu un marronnier politique : on allait fermer les centrales, miser sur les énergies renouvelables, et montrer l’exemple. Sauf qu’en ce 15 mai 2025, cette promesse a été officiellement enterrée. Le gouvernement a acté ce que beaucoup soupçonnaient depuis longtemps : on ne peut pas (encore) se passer du nucléaire. Pas sans conséquences. Pas sans risques. Pas sans douleur.

Alors, faut-il parler de revirement ? De pragmatisme ? Ou simplement d’une incapacité à anticiper, planifier et assumer une vraie stratégie énergétique cohérente ? La réponse, malheureusement, penche un peu pour les trois à la fois.

Un divorce jamais consommé avec le nucléaire

Ceux qui connaissent le dossier savent que la loi de 2003 prévoyait une sortie progressive du nucléaire à l’horizon 2025. Sauf que depuis, les crises se sont enchaînées : crise du gaz, guerre en Ukraine, prix qui s’envolent, climat qui se dérègle… Résultat : les centrales de Doel et Tihange resteront ouvertes. Et en prime, on parle même maintenant de construire de nouveaux réacteurs, plus petits, plus “modernes” (les fameux SMR, pour “small modular reactors”).

Le gouvernement justifie cette volte-face en invoquant la sécurité d’approvisionnement. Difficile de le contredire : aujourd’hui, près de 42 % de notre électricité provient encore du nucléaire. Mais cette décision repose aussi sur des paris risqués. Car nos centrales sont vieillissantes, leur entretien coûte cher, et Engie — l’opérateur principal — semble de plus en plus réticent à assumer seul les investissements. Résultat : la Belgique cherche des partenaires… parfois à l’étranger. Un comble, alors qu’on prétendait viser l’indépendance énergétique.

La transition verte, entre slogans et retards

En parallèle, le pays continue de promettre une transition vers un mix plus “propre”. Mais entre la volonté affichée et la réalité du terrain, l’écart reste énorme.

L’hydrogène vert ? Tout le monde en parle, peu le produisent vraiment. Certes, quelques projets pilotes existent, notamment en Wallonie. Mais pour passer à l’échelle industrielle, il faudrait des milliards, des infrastructures massives, et surtout… du temps. Beaucoup de temps.

L’éolien offshore ? La mer du Nord pourrait devenir notre poumon énergétique. Mais ici encore, ça bloque : retards dans les chantiers, conflits avec les pêcheurs, résistances locales. Sans parler du fait que transporter cette électricité jusque dans les foyers reste un défi technique et financier.

Heureusement, certaines initiatives locales montrent la voie. À Bruxelles, dans certaines communes, des citoyens s’organisent, partagent leur production solaire, et créent de vraies mini-communautés énergétiques. C’est concret, efficace, et surtout porteur de sens. Mais ce modèle reste encore marginal. Une goutte d’eau dans une mer de besoins.

La géothermie, enfin, fait figure d’outsider. Elle fonctionne très bien en Islande, c’est vrai. Mais la Belgique n’a pas de volcans, et nos sous-sols sont complexes. Quelques projets pilotes existent, mais ils avancent lentement.

Un pays sans cap clair

Le vrai problème, en réalité, c’est que la Belgique ne semble pas savoir où elle va. Chaque gouvernement affiche de bonnes intentions. Chaque crise apporte son lot de mesures d’urgence. Mais il manque une vision. Un cap. Une cohérence.

Résultat : on bricole, on ajuste, on navigue à vue. Les citoyens, eux, sont perdus. Les experts, inquiets. Et les industriels, prudents.

On ne peut pas tout faire en même temps. Maintenir du nucléaire, investir dans l’hydrogène, développer l’éolien, relancer le solaire, construire des réseaux intelligents, financer la recherche, soutenir les ménages… Tout cela demande des choix. Des arbitrages. De la clarté.

Alors, que faire ?

Voici quelques pistes simples, concrètes, réalistes que le bon sens impose :

– D’abord, soutenir massivement les initiatives locales : l’éolien participatif, les toits solaires, les coopératives citoyennes. C’est rapide à mettre en place, ça crée de l’emploi, et ça donne du pouvoir aux gens.

– Ensuite, réserver l’hydrogène vert aux secteurs où il est réellement indispensable (industrie lourde, transport de marchandises). Inutile de rêver à une chaudière à hydrogène dans chaque maison : ce serait un non-sens écologique et économique.

– Enfin, ne pas se précipiter dans la construction de nouveaux réacteurs nucléaires tant que la question des déchets n’est pas sérieusement réglée. Laisser des tonnes de déchets radioactifs aux générations futures, ce n’est pas un projet. C’est un abandon de responsabilité.

Conclusion : un moment charnière

La Belgique est à un tournant. Nous devons choisir entre l’improvisation permanente et la construction patiente d’un avenir énergétique crédible. Cela passe par de la transparence, du courage politique, et un vrai dialogue avec les citoyens.

Le nucléaire, oui, peut rester une béquille provisoire. Mais la vraie force viendra d’un réseau d’énergies renouvelables bien pensé, bien ancré dans les territoires, porté par les citoyens eux-mêmes.

L’énergie, ce n’est pas qu’une affaire de câbles et de réacteurs. C’est une question de société. Et il est temps que la Belgique en prenne pleinement conscience.

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